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Comprendre et imaginer le fonctionnement mental

Pour se représenter le fonctionnement de l’esprit, dans sa pleine puissance et sa capacité évolutive et créative, il faut pouvoir le penser et l’imaginer. Travail nécessaire pour pouvoir l’objectiver, et le projeter comme devant soi, en mode d’écran. Présentation des notions et unités de pensée : signe, carte, correspondance, cartographie et encodage qui nous permettent de nommer, objectiver, distinguer et discriminer les réalités qui se présentent à nous sur le front de notre esprit.

Nommer les choses en les élevant au rang de signifiant, signifié, signe et catégories de pensée

Pour comprendre le fonctionnement mental, il faut d’abord l’élever au niveau d’un représentant et d’une catégorie, c’est à dire d’une capacité de représenter ce qu’il peut et doit représenter. « Je est un autre », disait Rimbaud qui dans sa fulgurance indique et indexe ce qu’il manie. Reste à se demander comment ? Comment manier cette capacité d’indexation et de catégorisation, désignation, avec sa puissance de conception qui est de pouvoir nommer l’autre comme soi, au-delà des apparences immédiates des perceptions réelles, et de le concevoir en même temps ? Comment comprendre la complexité et la fulgurance de cette définition et sa désignation, dans l’art de concevoir et imaginer, alors que notre imaginaire commun préfère s’appuyer sur des faits primaires de conscience et des perceptions de la réalité, tel un bon ouvrier et en assurance statique ? Une première explication serait de penser qu’on se perçoit avant tout en rapport avec des objets qui sont un, ou des semblables à soi. Telle serait une modélisation standard. Nous sommes d’emblée plongés dans le monde de l’analogie et l’analogique ou du peu différent. Mais concevoir ensemble de l’analogique et du différent, et leur notion ou leur essence, dans un même trait direct, est chose différente. C’est comme rassembler une chose et son contraire pour en faire quelque chose de nouveau. Ainsi, pour mieux peser l’affirmation créatrice de Rimbaud dans son esprit et son image, il faut d’abord l’élever au rang de signe et de symbole, et de signe porteur de son symbole. De façon à ce que ce symbole de type incarné, puisse représenter ce que cette affirmation dit ou représente. Comme la croix ou l’hostie censée représenter directement le corps du Christ ou sa vocation. Elevée à ce niveau, cette chose ou caractéristique catégorique, devient capable de nommer ou désigner quelque chose ou quelqu’un et de le référencer. Et cela dans un espace présent, mais aussi un potentiel futur. Mais il faut aussi que ce signe soit utilisé dans l’esprit, dans ce qu’il nomme et circonscrit, et comme le montrant du doigt, mais aussi de façon extérieure à la chose nommée ou référée dans l’esprit. Il s’agit d’une indexation de la chose dite et nommée, comme si on parlait d’un territoire. C’est sans doute ce que M. Lacan, exportant la chose depuis le domaine de la linguistique, a appelé le « signifiant ». Mais la chose dans son opération et ce qu’elle réalise est bien plus forte et complexe qu’il n’y apparaît. Elle le dépasse.

Car il ne s’agit pas seulement de nommer des unités de langage, au sens courant du terme, ni d’une représentation de la langue ou d’éléments de langage. Pour considérer ce que Monsieur Lacan nomme le signifiant, il faut l’élever au rang de catégorie de pensée, comme si vous disposiez d’un crayon ou d’un bâtonnet pour le manier et désigner ce qui est ainsi implicitement désigne et pensé. Autrement dit, on est en présence d’une chose qui dit ce qu’elle dit, mais en même temps la définit. L’enjeu est important, ne serait-ce que pour distinguer et différencier ce que l’on pense et à quoi on pense, du fait de le parler, soit une distinction entre catégorie de parler et fait de penser. Et il n’est pas facile de nommer cette chose et ses opérations en soi, dans leur existence et nécessité, pour rendre compte du monde, des entourages, et de leur appréhension, à travers ce mode de conception implicite. Car ce monde est d’abord impressionniste et fulgurant. Il se détache en delà du monde de l’usage et du banal. Il crée ou intervient aussi dans la possibilité de dire et de s’exprimer comme processus propre. […]  si on étend ce monde à des formes de pensées, classements et distinctions, opérant en même temps que ces identifications, on obtient des repères ou comme des catégories de pensées, porteuses de distinctions en soi. Qui plus est, si on étend ce monde à des formes de pensées, classements et distinctions, opérant en même temps que ces identifications, on obtient des repères ou comme des catégories de pensées, porteuses de distinctions en soi. Et ces formes de classement dans l’adossement et les fréquentations des réalités, ont également leur équivalent affectif et émotionnel. Si on étend ce mode de compréhension aux faits humains et à leurs distinctions et leur intégration, on comprend donc qu’on a affaire à des catégories d’ordre supérieur, dans leur façon de se comprendre, de se repérer, et d’avoir un esprit sur lequel on peut s’appuyer. Alors les catégories de la pensée, et pas seulement les pensées ou leurs faits bruts, peuvent acquérir de la précision et rentrer dans des ordres de distinction, et se nommer dans ce qu’elles distinguent et veulent dire. Les termes, tels des outils, peuvent alors être utilisés pour ce qu’ils veulent dire et pour concevoir. Ils deviennent une nécessité de dire et de comprendre, indispensable et créative. On est alors en présence ou comme en présence d’unités de type formel, qui seront porteuses de la qualité ou de capacité de dire, mais aussi de penser. Il nous faut bien comprendre qu’il nous faut dépasser le simple niveau du parler et du verbal et de la conceptualisation banale, pour réaliser comment nous pensons, conceptualisons, en général et précisément, même les choses de l’ordinaire, et pour être concret et présent face aux faits et aux réalités. Nous donnons ainsi des formes implicites et préalables, que nous référençons et indexons, en avançant. Car pour avancer, il faut aussi pouvoir « tailler de l’hypothèse ». Et pour concevoir, de façon faussement paradoxale, c’est à dire ne pas s’en tenir au paradoxal de type unitaire ou simpliste, faussement logique, il faut pouvoir remonter de l’élémentaire au complexe. Et admettre la complexité comme possible.

Ensuite, si vous élargissez encore cette notion de langue ou langage, sans la départager, comme une chose qui va ensemble et unit les besoins et nécessités de concevoir, parler et manier ou être présent et les inclure, à la façon d’un bâtonnet ou d’un trait continu, vous obtenez une correspondance entre un moyen mental et un moyen physique, selon un besoin de correspondance et de mise en relation. Vous disposez à ce moment d’un moyen et d’une dimension d’objectivation des données et éléments de votre réalité, qui seront présents quand vous rapporterez ou raconterez quelque chose. Les éléments de langue conçus comme nos « prêt-à-porter parlés », prennent alors l’allure et la dimension de représentations de l’esprit ou capacité de penser, sans lesquelles nous ne pourrions concevoir. Ces représentations et configurations deviennent ainsi comme des écrits, des tracés objectivés sur « le front de l’esprit », assimilables alors à un tableau qui vous fait face et attend vos réalisations. Elles sont assimilables à un besoin de noter. L’œil, le cerveau et la main sont alors connectés. Mais il faut y adjoindre aussi une connexion avec l’esprit, en tant que conscience ou pas, dans son principe et son implicite. C’est cette forme de systématique que Freud a dégagé et conceptualisé, et que M. Lacan a développé et théorisé amplement.

Pour résumer, je dirais donc que nous sommes mis, comme dans un face à face, devant une nécessité focale de réaliser ce que nous pensons, et comment nous le pensons, incluant aussi ce nous sommes et notre façon d’être. Cette forme de démarche et distance et de représentation à la fois, est essentielle. Le tableau ainsi représenté nous renvoie à nos capacités d’esprit, pas seulement en tant que symbole, mais aussi à notre capacité incroyable de conceptualiser, qui passe par le signe et la capacité de réduire les choses de la vie et de leur représentation à des signes et des schémas. Et il représente aussi une objectivation de la parole et du langage.

Vers une cartographie de la pensée ; penser l’esprit dans sa forme évolutive et intégrative, et dans des liens de continuité.

Le premier malentendu concernant la façon de concevoir les catégories de l’esprit tient en partie dans la difficulté que nous avons à imaginer une unité mentale pertinente de base. Il faut pouvoir imaginer plusieurs choses en même temps, et penser que nous sommes capables de les catégoriser et d’en prendre note, et sans savoir pourquoi. Et cette unité doit pouvoir contenir en soi une capacité de suivi et de suite, comme passant à la conséquence de ce qui découle ou a précédé. Et en même temps que le réel reste réel pour l’esprit connaissant et expérimentant un suivi de perceptions des réalités et du milieu. Prenons l’exemple d’un enfant, qui vit et construit une forme de continuité, dans les diverses formes de déambulation de sa mère. L’ensemble forme un périmètre de continuité, de sécurité ou de rassurance. Voilà une image de tracé et de suivi qui s’instaure et donne une forme de continuité à l’intérieur d’un espace. Mais dans le cadre de cette catégorie primaire et fondamentale de repère et suivi, va se créer et doit se créer des zones étrangères et de nouveauté à minima et progressive. Par-là s’opère un chevauchement entre ce que l’on connaît et notre mode de connaissance et son enregistrement, et ce qu’on ne connaît pas ou pas encore, et que l’on va rencontrer, et à quoi on va être initié. Il suffit pour cela de penser au goût et son rôle fondamental dans l’introduction des nouveaux aliments.

Je propose de catégoriser ce mode de connaissance et de prise de connaissance du nouveau, et la façon dont un élément de connaissance nouveau s’introduit dans sa catégorie. Surtout quand il s’intègre et devient intégré. L’exemple de la nourriture et des nouveaux goûts et aliments ou des nouvelles manières de manger, et d’être à table peut rentrer dans cette novation de la conscience. C’est sur ce modèle et noyau des apprentissages que je prends appui, pour considérer de façon plus précise l’appareil à connaissance que constitue le fonctionnement mental. Ce noyau et cette forme de connaître forment une transcendance, dans la façon de connaître, d’intégrer et de devenir, comme une chose qui prend rang de nature et de définition de soi. Il en va ainsi de l’histoire, qui elle aussi se comporte comme constituant notre être soi et substance concrète, dans quelque chose qui devient son étendue. Réside là une notion de continuité, quand bien même adviennent des événements brutaux. Car même s’ils constituent une rupture brutale avec ce qui était prévu, il faut le considérer comme devant se dérouler, autrement. Je cherche à attirer ici l’attention sur le fait que l’esprit est une capacité en soi, qui ne peut qu’être, mais qui ne peut pas dire d’où elle vient. Elle est et vient comme de loin ou depuis toujours. Cette dimension est à minima nécessaire pour considérer, tant nos évolutions que nos capacités de nous les représenter et de les suivre. Cette capacité à une puissance telle, dans l’abstraction, c’est à dire hors du contexte présent et de sa connaissance limitée, qu’il faut y reconnaître comme une capacité d’indexer des souvenirs, des acquis, des représentations, sous des formes de représentations et d’abstractions suffisantes, et de se les représenter par leur signe ou par évocation. C’est ainsi que se représente à moi la capacité du tableau, comme devant soi, et la capacité d’écrire comme une capacité de distinguer et de dire la chose hors du temps écoulé ou du changement. Le tableau devient ainsi une représentation majeure des capacités de compréhension, représentation, présence, suivi, et enchaînements. Il me semble donc que le cerveau, dans ses formes, actes et capacités de présence et intégration enchaînés, ne soit pas exclu des indications et informations qu’il donne à notre corps, qui devient alors un grand intégrateur.

Notre difficulté tient au fait de devoir nommer et désigner ce type de formation mentale, de capacité et de comportement, comme on si on lui attribuait des membres, et de lui accorder ainsi une unité en tenant compte de sa complexité. Le terme de « signifiant » ne peut ainsi suffire pour prendre en compte cette représentativité implicite. Bien que pour penser, il nous faille aussi manier des unités. Il nous faut donc concevoir une nouvelle forme et catégorie qui soit une forme de conscience et de visuel de base. Son fonctionnement, à concevoir comme une étendue, est donc plusieurs choses à la fois : un terme, une notion, une capacité de dire, de prendre en compte et donc d’inclure la notion, de lui donner une forme et une catégorie en sa connaissance et reconnaissance. C’est tout cet ensemble que je prends en compte et auquel j’associe les capacités du fonctionnement mental, dans sa base et ses complexités. Le terme de « catégorie » convient ainsi mieux, semble-t-il, que celui de « signifiant ». Il faut nous concevoir, de l’intérieur et de l’extérieur de nos fonctionnements, en vision et considération connexe, tant pour nous concevoir que pour concevoir. Et encore bien plus s’il s’agit de concevoir quelque chose qui nous est inconnu ou hétérogène. C’est ainsi que nous devons concevoir et tenter de nous concevoir, comme en décalé et décalage, ne connaissant que par profil ou mode de résultat. Et pas seulement comme des producteurs de langage, de psychologie ou de pensées, sans concevoir leurs catégories ou leur portée dans nos applications, connaissances et usages.

De tout cela il en découle un certain nombre de principes et de corrélats, dont le fait qu’à tout terme mental se manifestant, il faut y ajouter quelque chose qui soit implicite ou sous-entendu et qui ne se présente pas. Ce qui a grandement à voir avec la suggestion et la chose prise dans la dimension du suggéré. Mais cet élément n’est pas selon moi, et […] à tout terme mental se manifestant, il faut y ajouter quelque chose qui soit implicite ou sous-entendu et qui ne se présente pas. […] Car n’est vraiment compris que ce qui peut être imaginé et vu sans voir. comme on le croit, son refoulé, ou la chose omise ou pas seulement. Il est ce qui en fait à une force de promoteur et un lien avec la capacité d’imaginer. Car n’est vraiment compris que ce qui peut être imaginé et vu sans voir. Voilà de quoi mettre en perspective, la catégorie de l’entendement.

D’autant que si on conçoit assez bien les phénomènes de suggestion en soi, du moins de vue de l’induction et de ses effets, on conçoit moins bien l’ensemble des mécanismes de l’induction. Par exemple, ce qu’on appelle autohypnose, correspond sans doute aussi, en interne, à des effets de filtres et de schéma et catégories de pensées, à partir desquels nous parvenons à nous induire, et nous conditionner de façon propre. Nous sommes alors en présence, au moins implicite, de catégories de pensées existantes en soi, sans pensée ou parole explicite. A l’exclusion de paroles et pensées qui sont des conséquences du fonctionnement de notre esprit et de son suivi. Un peu comme si du fait de concevoir quelque chose, s’en suivait la cause et la raison ou le dialogue. C’est là quelque chose de très difficile à penser et à se représenter, car ce processus est aussi générateur. L’enjeu est pourtant de taille et dans la mesure où nous pouvons dire que nous sommes « fonction » et « outil » de nous-même, et de nos comportements, qui sont comme des formes d’entendement. Dans ces formes et catégories d’entendement se profilent et se taillent des formes pour penser la réalité et se lier à elle, de façon essentielle.

On peut nommer cette nouvelle dimension de l’esprit et de son fonctionnement, à un niveau que je qualifierais de « cartographique ». L’enjeu est de faire apparaître des continuités que l’on n’imagine pas normalement ou habituellement, comme étant sa façon de connaître et comme étant essentielle. Et qui se présentent comme des adhérences ou de la chronicité. Pour cela, il faut que la personne puisse et envisage de se connaître autrement que selon ses formes de connaissances spontanées et limitées, et qu’elle naisse à une forme et capacité de donner un index, une catégorisation. De façon réelle et paradoxale, il faut que la personne dans sa façon d’être, de connaître, et son comportement, ne s’imagine pas seulement selon un vis-à-vis, mais qu’elle naisse à la possibilité de connaître que ces comportements sont réels. A savoir, que c’est ainsi qu’elle se comporte, comme si c’était un tic ou une impulsion, et pas seulement parce qu’on l’induit ou le regarde ainsi. Il nous faut ainsi concevoir une imagination, au-delà de l’imaginaire et de l’imagination commune ou de ses caches de raisonnements immédiats, erronés ou répétitifs. C’est important pour concevoir, plus et au-delà de soi, et s’éloigner du tout de suite et du maintenant, et de la compulsion à rapporter toujours la même chose. Mais aussi pour pouvoir accéder implicitement à sa cohérence et à sa ligne de développement propre. Cela se manifeste dans la façon de parler et de raconter, et d’écouter, et dans la capacité d’index et de suivi. Car le sens ne se dégage pas seulement de ce qui est dit, mais de sa suite, et de son mode. Ce que l’écrit littéraire ou la diction incarne très bien.

Ce que je nomme ainsi cartographie renvoie à la façon dont on se représente les choses, en les suivant et dans le suivi de se les représenter. Ces enchaînements ont des conséquences. Ils sont à la fois abstraits et implicites, mais aussi très physiques. Car il faut bien comprendre que lorsque nous parlons et que l’on nous parle, ou que nous concevons ou entendons quelque chose, une représentation implicite se constitue et double notre conscience et attention au présent. Cette représentation et attention sur l’instant nous tient lieu de conscience et nous relie à ce qui est. Mais cela est insuffisant pour notre étude et sa complexité. Pour progresser, il faut considérer des données comme étant des ensembles cartes. Un peu comme un processus qui consiste à photographier et assembler des données, en les réunissant dans un seul dossier où elles sont présentes à l’état compressé. Nous allons, par exemple, suivre ce que quelqu’un nous dit, comme une succession d’états. Pour ne pas recevoir ses paroles de façon laconique, on les dépliera, en faisant en sorte que cette carte nous donne des articulations. Ce qui demande de se former à l’écoute et à l’entendement. Il est frappant d’ailleurs de réfléchir à la façon dont les personnes nous parlent, en imaginant qu’on les comprend, sous prétexte que l’on parle la même langue, et qu’à ce titre on sait décoder ce qu’elle dit, en unités sommaires et ramassées. En ce sens, la parole s’oppose à la lettre, qui est sensée dire ce qu’elle dit.

Penser en termes de cartographie met sur la voie du signe et de la pensée rassemblés

Abordons à présent les points de vue « carte » ou « cartographie », ou « besoin de représentation », et associons-les à un processus de découpe et de « lettrage », en unités de découpes potentielles qui aient du sens. Quels sont les éléments conceptuels qui se présentent à nous, si nous voyons et objectivons ainsi les choses avec notre esprit ? Nous sommes proches de la notion de discrimination, d’entité, et de formes d’entités que nous pouvons distinguer. Ce processus de discrimination implicite et virtuel, est essentiel. Ainsi, nous pouvons disposer d’une forme de schéma anticipateur en soi, producteur de façon virtuelle ou réelle de connaissance. Nous bénéficions dans la virtualité et l’imagination, d’un plan de projection nécessaire. Ajoutons-y la notion de distance nécessaire, et son résultat. Ce qui va être essentiel, ce n’est pas tant ce qui est pointé, que ce qui l’indexe, le nomme et le caractérise. La notion d’espace ou d’intervalle, est ici essentielle pour pouvoir créer une notion de continuité. Ce qui va être essentiel, ce n’est pas tant ce qui est pointé, que ce qui l’indexe, le nomme et le caractérise. La notion d’espace ou d’intervalle, est ici essentielle pour pouvoir créer une notion de continuité.

Toutes ces caractéristiques et ces compétences évoquées, rejoignent la notion d’intuition, avec sa force nécessaire d’anticipation. Si on prend l’exemple de la lecture, on ne fait pas que lire ou recevoir, on anticipe aussi sans cesse la suite. Ces ensembles de notions et leurs configurations font image et permettent d’anticiper le résultat ou point de résolution. C’est à cette notion dans sa capacité d’engendrement et de génération, que je tente de donner un nom. Ce qui permettra de se mettre en état de connaissance futur et potentiel. Par ailleurs, dans l’échelle des connaissances ou des comparaisons implicites, cela réduit l’écart entre le réel, la réalité et le cerveau, dressant ainsi un pont entre deux rives non réductibles. La notion de carte apparaît de ce fait justifiée. L’écran des résultats et des inductions semblant livré en sus. Nous disposons ainsi d’une capacité et d’un appel à une vision mentale élargie, consistant dans le concept de la chose, la déplaçant et la décollant complètement de la réalité pragmatique courante, pour la constituer en objet de mémoire et de pensée. La réalité du monde réel proche et environnant peut de ce fait être remaniée, ou connue autrement, et comme s’inversant par à rapport à son mode d’entrée ou de connaissance banal. L’ensemble fait réaliser le besoin et la nécessité d’objectiver en conscience devant soi. Phénomène essentiel bien que difficile à concevoir, mais qui est à traiter comme un besoin et comme une réalité.

Ainsi pour résumer et rappeler des points précédents, nous avons vu que :

  • La notion de signifiant, reprise et étendue par M. Lacan, nous ouvre à une forme d’objectivation du fonctionnement de l’esprit par les personnes, qui comprend la notion d’inconscient. Je tente pour ma part d’élargir ce profil en donnant une forme plus générale au fonctionnement mental et de l’esprit, en l’ouvrant sur la notion de « catégorie » de l’esprit.
  • La définition qui en ressort renvoie à la notion de « carte » ou de système ou moyen permettant de prendre en compte certaines réalités en cours, prises dans un milieu ambiant.
  • Ce fonctionnement implique dès lors des formes de photos, de prises en compte et d’archivage en mode de découpage par secteur.
  • Ce fonctionnement est lui-même indexé de façon telle qu’il passe à l’identification et à une forme de connaissance, qui est une forme en soit d’index et de représentation des perceptions et des réalités du champ. On peut le comparer à une suite de tableaux.
  • La notion de champ et de perspective découle des formes et symboles vivants et incarnés, constitutifs du fonctionnement mental.
  • Ce champ renvoie à la notion d’espace, de temps, d’intervalle et de soi. Il oblige aussi à penser le traitement des distances entre nous et les perceptions de notre corps et de notre esprit, à l’intérieur de nos espaces de présence.

Il est très important d’aider les personnes à se rendre compte comment elles moulinent les données de leur conscience et de leurs environnements concrets, dans leurs effets, perspectives et récurrences sur elles. Pas seulement en devenant conscientes. Ce qui implique de tenir compte des continuités, ou de nos sentiments et perceptions de continuité, et de nos gestions de sens du temps et du continu, de façon active et non passive. Et de nous rendre compte de comment nous traitons certains évènements, dans notre illusion du sentiment du continu, et dans notre besoin et fabrique de ce sentiment. C’est donc l’ensemble de ces conditions comme faits et données, qu’il nous faut tenter d’intégrer dans une forme ou notion d’unité intégrante de base. En lui donnant un nom, pas seulement pour désigner ou en parler, mais pour pouvoir le prendre compte, et le déterminer et le discriminer, à partir de nos fonctionnements et prises en considération. Ces prises en considération ne se font pas seulement sur un mode pause ou réfléchi, mais en mode de découpage et de système, afin de pouvoir désigner et voir comment nous manions des notions implicites et sous quelles formes. La réalité des personnes n’est pas de ce fait seulement une réalité psychologique ou imaginaire. Elle renvoie à un ensemble beaucoup plus large.

On peut tirer beaucoup de données ou de conclusions de ce mode de connaître et d’explorer. Mais que représentent alors les réalités, la conscience de soi et la conscience que la personne se fait, en son principe, et au-delà de ses volontés et sa raison psychologique, en forme d’à priori ? Se dessine ici une forme de miroir particulier, latéral, accompagnant la personne et tel qu’elle ne le sait pas, et tel qu’elle a aussi des façons particulières de ne pas le connaître. Beaucoup de choses seraient à dire, penser, et considérer, pour considérer son champ de production et d’accompagnant, qui me font déduire et réfléchir en mode d’écran et de surface. On touche en effet là à une fonction essentielle dans le traitement de nos réalités, de leur pratique et aménagement. A savoir que nous avons besoin d’organiser sous une forme pratique, chronique et régulière. Et qui plus est, que nous bénéficions alors d’une conscience de nos besoins sur le plan de la prise en compte et des codifications systèmes de nos réalités. Besoins qui incluent dans nos réalités propres et intimes et leurs formes et manières, des formes de rites, de sacralité, en retour sur soi et son environnement, de façon propre. Comme la confection d’un tissu et de photos personnelles. Cela est à prendre en compte, dans notre perspective de champ et la considération implicite qu’elle constitue et assigne de nos réalités. Cela sous une forme groupale d’abord, puis ensuite élargie en ses formes de prise en compte, considérations et traductions dans une forme de recollection propre des éléments et évènements du vécu. Le terme de recollection dans son sens étymologique de reprise et retraitement d’un événement convient bien. Car il renvoie au fait de reprendre un souvenir et fait passé, pour le réadapter et retraiter dans le temps de l’actualité présente. A condition toutefois de prendre en compte son phénomène de système, résumé et potentiel, dans le fonctionnement carte et esprit, personnel et en propre des personnes. De ce point de vue, profil et perspective, le terme d’encodage, servant à considérer les prises en compte dans leur mode système, personnel et particulier, semble vraiment justifié. Pas seulement au titre de la description, mais de la compréhension de la fonction mentale, de ses implicites déjà codés, de sa compréhension et de ses maniements. A partir de là, nous pouvons mieux concevoir la notion d’espace, espace potentiel dans une perspective de champ, champ parallèle et de prise en compte. Sorte de préalable de ce qui est et doit être et pour comprendre le processus du travail mental en forme de suite, de suivi et d’intégration.

Espaces de création en forme de modèles et pont avec les neurosciences

Nous voyons alors que cette notion d’assemblage possible par carte, et cette notion de prise en compte par saisie, notion collectée de façon fulgurante parfois, pour parodier Rimbaud, prend alors sa portée et son sens. Cet espace et potentiel d’exister, et sa révélation, comme un surgissement imprévu. Imprévu dans l’espace du choc de la sollicitation et de l’écran du cadrage du fonctionnement mental image, ordinaire ou coutumier. Cet espace est totalement créateur, et sert d’exemple des révélations et des possibles. Il est clair qu’on ne peut le copier et qu’il donne l’idée et l’image de la totale singularité et originalité. Mais à partir de là, on peut prendre exemple et faire beaucoup ou beaucoup profiler et aider à profiler. Notamment aider à changer les images mentales, leurs codifications inadéquates, et leurs constitutions en objet fixes de divers genres. Elle permet de mettre en champ de vision, le mode de perspectives des ancrages, et des croyances, ancrages et arrimages de fond. Ce qui constitue d’autres espaces implicites et donne leurs raisons au sein de leur type d’espace. Ces espaces forment aussi des catégories d’images potentielles, d’effigie, de distance. Ces espaces et catégories, voir ces formes de modèle pour soi, ont besoin d’être catégorisés en leur forme et langage. Il est vrai que ces espaces ou objets dimensionnels quittent l’espace de nos créations et réalités sociales courantes. Ces images et ces réalités mentales gagnent le visage de l’espace, de son profil, de son regard et sa figuration et configuration. Ces espaces magiques en quelque sorte nous donnent une image de modèles, de l’étant et de l’étendue, et nous éclairent, comme de côté. Ces espaces magiques en quelque sorte nous donnent une image de modèles, de l’étant et de l’étendue, et nous éclairent, comme de côté. Ainsi, les vrais poètes, comme les grands chercheurs, sont des créateurs, des chercheurs du monde de l’invisible qui ne se voit ni ne se donne tout de suite ni maintenant. Mais ce monde, cet univers, cet espace, sont aussi essentiels aux humains dans leur quotidien et la rude conception de celui-ci et de leurs tâches sociales. Ne serait-ce que pour construire, changer, améliorer. Ce qui demande un minimum de regard figuratif, collectant, inspiré, faisant sortir du sort de la terrible routine et des cadres de la logique instituée en mode de raison, pilier, et logique d’intégration et de convenu collectif. La notion de carte et profil carte, alors se défend encore plus. Ne serait-ce que pour que les personnes, puissent être amenées « à leur raison ». Et qu’elles ne soient pas seulement ancrées et légitimées dans leurs idées et consciences collectives de leurs pactes sociaux implicites et raisons inchangeables. Et qu’elles ne consultent pas seulement sur idée de besoin radical ou de souffrance insupportable. Mais par besoin d’aller au-delà de leurs routines et de leurs liens conditionnés et très ancrés, comme dans les objectifs assignés en coaching d’entreprise. Et se faisant alors totalement otage des grandes entreprises et de leurs conditions et conditionnements mental et social, massif et général. C’est la raison pour laquelle je défends et ai défendu, les coaching personnels, hors entreprise, ou liés à elles, dans des processus au moins latents de respect, champ, liberté à minima et négociation. Et que je défends et est défendu les coachs qui veulent et apprennent à pratiquer ainsi.

Mais, seuls les poètes de la dimension de Rimbaud, sont parvenus à nous donner l’exemple d’une catégorisation fulgurante et de l’élévation de la particule mentale et verbale au rang de modèle et d’illustration de sa catégorie. Le signe de sa vision poétique et synthétique transparaît bien dans son sonnet des « Voyelles ». Rimbaud a su créer un « symbole carte ». On y constate la totale correspondance symbolique et de face à face des choses, mises en regard dans son tableau des voyelles. Pour prendre la dimension d’un tel regard, et passer dans d’autres champs, on peut se reporter au travail extraordinaire de certains talmudistes, comme le rabbin Adin Steinzaltz et sa formalisation des lettres de l’alphabet hébraïque, élevées au niveau du symbolique et du symbole. Dans un autre domaine, je citerais également les travaux de recherche du Docteur Gisèle Gelbert concernant la sémiotique des voyelles dans le rapport consonne/voyelle dans le cadre de la syllabe, qu’elle élève à la catégorie d’objets de pensée, intervenant dans la fabrique linguistique des mots du langage (1).

On peut également rapprocher cette fulgurance de rapport et de fonction, entre le cerveau et les images, des travaux modernes sur le cerveau et sur les fonctions de « neurones miroirs », qui viennent dévoiler de façon imprévue des propriétés du fonctionnement cérébral. L’ouvrage écrit par Giacomo Rizzolatti et Corrado Sinigaglia, « Les neurones miroirs », paru en février 2011, aux éditions Odile Jacob, en parle très bien. Et de là, on peut aussi s’intéresser au courant de recherches en neuroscience cognitive, venant donner corps à une psychologie expérimentale et physique. Tout ce qui soutient alors le mouvement de la psychologie réelle et de la « réal psychologie » se veut réel et pragmatique. On pourra ainsi se reporter aux travaux sur l’empathie, les sentiments sociaux, les formes du stress et leur conception et réalité, mais aussi leur forme de réalisme psychosocial. Nous pouvons aussi faire le lien et réfléchir au problème de la défection du système des émotions et des sentiments chez les autistes, et ce que cela implique dans la modification de leur relation au monde. Des conflits en ont découlé. Mais, il est clair qu’il faut pouvoir dépasser ici les points de vue conflictuels et polémiques, potentiellement idéologiques. La plus grande institution est bien celle du temps, dans sa forme, son étant et son existence. Dans son modèle, il pulse et impulse, à partir des modèles existants, du changement dans les corps, réalités et esprits des hommes, en mode d’actualisation du vivant, évoluant avec ses besoins. Ce qui fait que, pour ma part, je plaide pour accueillir ces travaux, dans leurs incidences, sans sectarisme et débats fondamentaux essentialistes. Car leur lecture, incidence, mode de catégorie, imprégnation et suggestion, suggère des modes de prises en compte renouvelées ou à élargir, dont personne n’a la primauté de la raison totale, mais aussi des méthodes d’apprentissage et d’évolution. Gardons donc à l’esprit que nous sommes dans un univers de correspondances possibles et de perspectives potentielles, qui restent à établir.Cela peut mener à des méthodes de changement de conviction, par rapport aux modes d’entrée des notions, conditions et catégories mentales et sociales, organisées en mode clos et standardisé et incluant des formes de pactes sociaux implicites.

Gardons donc à l’esprit que nous sommes dans un univers de correspondances possibles et de perspectives potentielles, qui restent à établir. Et pouvant permettre aux personnes de se hisser au niveau du profil et du besoin de leurs catégories existentielles. Avec l’effet et le miroir incident et latent, que celui-ci va exercer sur eux, comme résultat de leurs fréquentations et expériences de vie. Ce en quoi il est si important de solliciter les personnes pour les associer à leurs problèmes et ne pas les réduire à une réification et objectivation catégorique. Attention aux abords trop catégoriques et aux diffusions trop massives qui abstraient les personnes, sans le savoir vraiment.

Note :

1. Gisèle Gelbert, « Parler, lire, écrire », paru aux éditions Odile Jacob, disponible sur Internet. Voir la notion de formatage.

 

 

Lucien Kokh, 23-02-2014

COMMENTAIRES

  • Mitelman dit :

    Félicitations pour ce travail!
    je suis ravie de pouvoir accéder à ces textes et les questionner progressivement

    Liliane

  • messaour dalila dit :

    je vous remercie infiniment pour votre travail ,a l’occasion je vous demande de m’aider si possible sur le même thème a peu prés,plus précisément je travail sur le fonctionnement mentale des hémodialysés face a leur complications sexuelles dues a la maladies et a leur état psychologique (contraintes des soins indiqués,leur dépendance a la dialyse…..).

    Messaour

    • Lucien Kokh dit :

      Bonjour
      Je ne peux pas vous répondre précisément car me manque déjà des données vous concernant et le circonstances par quoi vous me remerciez de mon travail. Je ne peux supposer que comme appréciation vécue vous m’avez vue à cette conférence au Cercle François Arfel? Mais j’ai besoin de précision comme données et code de contact, car je vois que les personnes ont sinon du mal à me lire ou m’entendre comme théoricien, voire penseur, car je suis obligé d’expliquer beaucoup de choses qui sortent des données du langage psychologique courant. Pourtant je tente en mode écrit ou oral sur le blog. une façon d’offrir.

      Et de plus je n’ai pas assez de précisions sur ce que vous faites, votre contexte, quel est votre poste en conscience sociale, en conscience du travail et du collectif ou de l’ambiance particulière ou s’inscrit votre psychisme. Des précisions en mode de code subjectif objectif qui vous sont propres dans votre regard et contexte. Et ce en quoi votre regard et votre position vous donne l’envie d’aider ou faire avancer des problèmes posés au travers le prisme de ce regard. Les problèmes doivent être considéré dans leur contexte, où les relations humaines se trouvent en jeu, dans le pluriel, leur détermination, et le singulier. Après on peut plus et mieux parler de l’enjeu des complexes de souffrances ou de difficultés, transmises, confiées.

      Je ne peux que répondre en mode cordial à votre demande de contact et en rapport au fait que vous semblez apprécier mon type de travail, recherche, style et position. Voyez si vous pouvez m’en dire plus en réponse, sans que nous nous sentions engagés de fait.

      Bien cordialement: Lucien Kokh

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